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Les prisonniers de la mémoire (La Vie)

21.03.1991

Il y a six ans, Eyal Sivan quittait son pays, Israël, et commençait à s'interroger sur la société israélienne. Son film, Izkor, les esclaves de la mémoire, est le fruit de cette réflexion inquiète sur une société repliée sur elle même, vivant dans le souvenir de la Shoah.
Sivan a filmé en cinq semaines les cérémonies du mois d'avril qui perpétuent le souvenir. Partant de ses souvenirs d'enfance, il suit, dans son école, professeurs et élèves, travaillant sur le système éducatif israélien et les rapports à la mémoire.
Son film dérangera bien des consciences. Et si l'éducation qu'on donne aux enfants - n'oubliez pas, ne pardonnez pas - était une éducation réductrice, étouffante ? Eyal Sivan laisse la parole aux élèves : "Il faut rendre les Territoires ! Il y aura la paix et plus de ..., lance Oshik Ohana. Avant, on s'entendait comme des frères, c'est fini, ça !" Et sa sœur d'avouer : "A l'école, on étudie surtout les mauvaises choses." Keren, en revanche, rêve d'entrer dans l'armée, dans l'unité de combat la plus active pour une fille. Oshik laisse place à l'espoir : "Ce que je retiens de la Shoah, c'est que les peuples nous haïssent. Je ne veux pas servir dans les Territoires. Ou alors, être infirmier ou bien cuisinier." Le gamin introduit la pensée du professeur Leibovitz : "On se souvient de ce qu'on nous a fait, ça nous absout de tout. Il n'y a pas de leçon à tirer de la Shoah, c'est peut-être ça ! " Le film d'Eyal Sivan a le courage de poser la question : "Les Israéliens peuvent-ils continuer de se débarrasser des problèmes qui se posent à l'homme juif en invoquant la mémoire ?"
F.M.