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Izkor les esclaves de la mémoire : portrait décapant de la société israélienne. (La Vie)

30.01.1991

Imaginez une journaliste volontairement en rupture de télé - celle qu'on vous sert jour après jour - , pour se plonger dans tout (ou presque !) ce qui se fait ailleurs et surtout dans des œuvres inédites qui privilégient la création. Cela se passait au FIPA, le Festival international de programmes audiovisuels, qui se tenait à Cannes du 10 au 15 janvier. Un FIPA explosif, dont la tonalité fut le reflet de ce qu'est le monde actuel : une poudrière.
Izkor, les esclaves de la mémoire, de l'israélien Eyal Sivan, fait l'effet d'une bombe. Sivan filme de jeunes israéliens auxquels on apprend à marteler le nom des camps nazis et qu'on prépare à la guerre. En contrepoint, un vieux professeur de fac ose dire que la Shoah ne peut absoudre les Israéliens de tout. Film pas tout à fait abouti dans la forme, lzkor nous apprend plus sur la société israélienne que n'importe quel reportage. Devoirs de classe, de l'Iranien Abbas Kiarostami, lui répond. C'est une recherche imagée sur la situation de l'enseignement en Iran où les gamins sont « instruits » pour combattre l'ennemi Saddam et déclarent, sous l'œil d'une caméra-interrogatoire, préférer les devoirs de classe aux dessins animés ! Là aussi, on fabrique une génération de fanatiques.
Hidden Faces, reportage de l'Anglaise Claire Hunt, est une enquête sur la condition des femmes égyptiennes, qui en dit plus long que tout ce qu'on a pu lire sur le port du voile, sa signification. Pour mieux saisir l'Allemagne d'aujourd'hui, il faut plonger dans November days, de Marcel Ophuls, que FR3 va diffuser le 11 février à 22.40. Kaléidoscope de pensées, d'images. Tourné dans des bars, des restaurants, des taxis ou des rues, au moment de l'effondrement du mur de Berlin, le film d'Ophuls interpelle aussi bien l'homme de la rue que les politiques, ou le responsable de la Stasi. Le montage est astucieux, les questions aigres de Marcel Ophuls éclairent le passé et l'avenir de l'Allemagne, mais aussi celui de l'Europe. Le passé de l'Allemagne nazie, Les yeux d'Eva Braun, de Patrick Jeudy, nous le fait revivre, à travers cet extraordinaire documentaire composé des films que tournait Eva Braun en 1938, en 1941, en 1943 et même en 1945. Il faut la voir s'ébattre sur la terrasse de Berchtesgaden en pleine guerre, voir « l'oncle Adolf », pour comprendre - aussi - la psychologie d'un dictateur d'hier ou d'aujourd'hui. De l'autre côté de l'Atlantique, voici l'Amérique des bandes qui, à Los Angeles, font régner la terreur. C'est Gangs, caps and drugs. Un produit typiquement américain, spectaculaire, efficace. Enfin, Crimes et passions, de Mireille Dumas, FIPA d'argent catégorie grands reportages, et qui sera prochainement diffusé sur TF1, nous ramène en France. La réalisatrice démonte le mécanisme de l'agression à travers l'histoire d'Alain. De la télépsychanalyse de très haut niveau. Avis partagés.
F. M.