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Rencontre by C. Brackers d'Hugo (La voix du nord)

09.04.1999

Rony Brauman et Eyal Sivan ont puisé matière d’un livre et d’un film dans les 350 heures du procès d’Adolf Eichmann

Il raconte son travail, nous donnons un sens à ce travail
Ancien président de "Médecins sans frontières", Rony Brauman était, hier en fin d’après-midi, au forum de la FNAC pour évoquer le livre et le film qu’il vient de signer et réaliser en compagnie du cinéaste Eyal Sivan. Le livre, "Eloge de la désobéissance" et le film "Un spécialiste" évoquent de façon indépendante et complémentaire la vie d’Adolf Eichmann dont Rony Brauman rappelle qu’il était "un fonctionnaire ordinaire, n’ayant jamais cédé aux délires antisémites, exécutant froid et abject d’un crime de masse".

Le procès de ce bourreau eut lieu en 1961 après d’Eichmann eut été enlevé à Buenos Aires par un commando des services secrets israéliens. Un Procès film, le premier de l’histoire, 350 heures de vidéo qui partirent aux Etats-Unis et ne revinrent en Israël qu’en 1978. Ces documents retrouvés presque par hasard par Eyal Sivan constituent la matière du film : "Nous avions pensé ajouter une "caméra subjective" comme fil conducteur du déroulement du procès mais cette idée a été abandonnée au bénéfice de la richesse des témoignages qu’ils viennent des victimes ou d’Eichmann lui-même".

Rony Brauman n’élude pas la question des "conseils juifs" mis en place par la Gestapo, devenus peu à peu auxiliaires du bourreau en dressant les listes de ceux qui partiraient dans les camps et surtout maintenant le secret sur la réalité de la solution finale : "Il n’y a pas d’un côté la victime absolue et de l’autre le bourreau absolu. Il existe ce que Primo Levi appelle la "zone grise"". C’est ce silence coupable qu’il a ressenti directement lui-même lorsqu’en Ethiopie, alors qu’un génocide était mis en place par une dictature stalinienne, les organisations humanitaires se taisaient, laissant un crime contre l’humanité se mettre en place.

Le film dure deux heures et a pris le parti de ne pas suivre le déroulement judiciaire du procès : "Sur ce qui s’est passé au vel’d’hiv, par exemple, il se passe deux mois entre les témoignages des parents ou enfants de victimes et la réponse d’Eichmann. L’ordre judiciaire était impraticable aussi, avons-nous voulu que témoins et accusé se répondent. Eichmann raconte son travail nous rappelons quel est le sens de son travail.

C. BRACKERS d’HUGO.