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Carnet de route en Palestine-Israël by Caroline Gourdin (Le Soir, Belgique)

24.11.2003

Michel Khleifi et Eyal Sivan ramènent un immense témoignage, passionnant

Quatre heures et demie pour raconter de l’intérieur un territoire nommé Israël-Palestine. Entre passé, présent et futur

Au-delà des apparences tribales dans lesquelles nous ne nous reconnaissons pas, et forts de notre expérience commune, nous avons décidé ensemble de retourner au pays pour le retrouver, le redécouvrir et dévoiler la réalité géographique et mentale dans laquelle vivent aujourd’hui les hommes et les femmes d’Israël. Michel Khleifi et Eyal Sivan sont nés l’un à Nazareth, l’autre à Haïfa.

Le premier vit à Bruxelles, le second en France. Cinéastes, auteurs de nombreux films documentaires et de fiction souvent remarqués, ils ont choisi de suivre ce qu’ils appellent “la route 181”, d’après la résolution 181 adoptée par l’ONU en 1947 et qui prévoyait le partage de la Palestine en deux Etats, l’un juif, l’autre arabe. 56 % du territoire avait été attribué à la minorité juive, 43 % à la minorité arabe, avec au centre une zone internationale. Une frontière purement théorique éclipsée par la première guerre israélo-arabe.

A l’été 2002, munis seulement d’autorisations de tourner, Michel et Eyal ont filmé, au hasard des rencontres, des anonymes, israéliens et palestiniens. Cent heures de rushes. Deux mois de voyage, en passant par le sud, de la ville portuaire d’Ashod aux frontières de la bande de Gaza ; le centre, de la ville judéo-arabe de Lod à Jérusalem ; et le nord, jusqu’à la frontière avec le Liban. Un film exceptionnel de quatre heures et demie. Un engagement aussi, à “construire un acte filmique”. Et un immense témoignage, pluriel, non censuré, sur le passé, le présent et l’avenir de ces hommes et femmes au nom desquels les guerres se font.

Des contremaîtres israéliens et géomètres palestiniens travaillant sur un même chantier, une vendeuse de jus de fruit juive sur les ruines d’un village arabe, une vieille femme palestinienne dont la maison doit être démolie pour laisser passer une route, une juive yéménite raciste, un vieux pionnier, une ancienne prisonnière politique arabe et sa voisine juive, un Bédouin, des juifs américains, des militaires, des manifestants, des écoliers... reconstruisent mot après mot le puzzle d’un quotidien peu ordinaire.

Avec nostalgie, tristesse, rage, haine, fatalisme, détermination, mépris, espoir... jamais avec indifférence.
Loin des discours officiels, ce carnet de route près du réel suscite nombre de réflexions, d’émotions parfois contradictoires. Laisse une trace.

Caroline Gourdin - Paris